Formuler une recette

Formuler un savon de rasage

En peu de temps, 2 Stéphanie sont venues me trouver pour je les aide à formuler un savon de rasage. Je me suis dit que ça intéresserait certain.es d’entre vous alors je viens détailler tout ça ici.
Comme d’habitude, j’expose ici le fruit de mes recherches, à vous ensuite de vous en inspirer, d’adapter afin de créer la recette qui vous convient.

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Qu’attendons-nous d’un savon de rasage ?

Un savon de rasage se formule différemment d’un savon classique car il doit remplir certains critères particuliers :

  • Sa mousse doit être abondante, dense et crémeuse afin d’être répartie uniformément sur la zone à raser. On ne veut donc pas de mousse aérienne à grosses bulles ou de mousse fine et laiteuse.
  • Elle doit aussi être durable et tenir sur la peau le temps du rasage sans s’estomper.
  • Le savon doit s’émulsionner rapidement
  • On veut de la glisse afin de faciliter le passage de la lame.
  • Et on veut aussi de la douceur pour que la peau reste confortable et ne tiraille pas.
Photo empruntée à De Bulles et d’eau Fraîche, clique pour voir son savon de rasage

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Une mousse dense et abondante

Il y a une chose que je répète souvent et qui est indispensable ici :

Connaître le profil d’acides gras de ses huiles et beurres
clique pour retrouver les articles

Les acides gras ont chacun leurs propriétés. Certains apportent de la mousse, d’autres de la dureté, d’autres encore de la douceur. Connaître leur influence vous permettra donc de choisir vos gras en conséquence.

Dans le cadre d’un savon à barbe deux acides gras sont particulièrement recherchés car ils donnent une mousse dense et crémeuse :

l’acide stéarique et l’acide palmitique

On trouve l’acide stéarique :

  • directement en paillettes. Si vous ne souhaitez pas utiliser de dérivé d’huile de palme, il faudra renoncer à l’acide stéarique brut puisqu’il est en majorité extrait de cette huile (bien qu’elle en contienne peu). Si vous choisissez de l’utiliser en grande quantité dans votre recette, je vous conseillerai de faire votre savon au chaudron car la pâte sera beaucoup plus gérable avec cette méthode. En saf vous vous retrouverez avec une trace plus rapide que l’éclair…
  • dans la cire de soja (87%). Elle pourra donc être une bonne alternative à l’acide stéarique brut.
  • ou dans les beurres de mangue (42%), de karité (40%) et la graisse de bœuf (22%).

On trouve l’acide palmitique :

  • comme son nom l’indique, dans l’huile de palme (44%).
  • en bonne proportion aussi dans les graisses de bœuf, de canard et de porc.
  • et en moindre quantité dans les huiles de son de riz (22%), d’avocat (20%) et d’olive (14%).

C’est une bonne idée que ces 2 acides gras représentent entre 30 et 40% de votre recette. La composition en acides gras de votre recette est indiquée dans Mendrulandia, SoapCalc et SoapHomeMade.

Un autre ingrédient, totalement optionnel, qui a des effets sur le crémeux et la tenue de la mousse est l’alcool cétylique. Un co-émulsifiant utilisé principalement pour faire des crèmes hydratantes. Dans les savons à barbe, il peut se doser entre 3 et 5% des huiles (et 1 à 3% dans un savon classique). Il accélère la trace par contre.

Afin de démarrer la montée de la mousse il faudra quand même intégrer un peu d’huile de coco mais pas trop, pour ne pas assécher la peau. L’huile de ricin est aussi la bienvenue car en plus de booster la mousse, elle a un autre avantage pour les savons de rasage que nous verrons tout à l’heure.

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Apporter de la douceur

Même refrain que tout à l’heure, un coup d’œil au profil d’acide gras vous permettra de choisir quelles huiles utiliser.

Cette fois-ci, pour la douceur, nous allons nous concentrer sur les acides oléique, linoléique et linolénique. Vous aurez l’embarras du choix puisque quasiment toutes les huiles liquides sont concernées.

Personnellement j’aurais une petite préférence pour les huiles d’avocat et de son de riz qui sont des huiles très douces. Et comme elles sont riches en acide palmitique, elles participeront également au crémeux de la mousse. Tournesol classique, pépins de raisin, colza ou chanvre en petite quantité (car fragiles) sont aussi un bon choix.

Vous pouvez très bien vous arrêter là. Si vous voulez faire des ajouts, vous pouvez vous tourner vers :

  • les ingrédients mucilagineux comme l’avoine, le gel de lin ou de psyllium, pour leurs propriétés adoucissantes et apaisantes. Cela permettra aussi de faciliter la glisse du rasoir.
  • l’aloé vera
  • les laits (liquides ou en poudre)

Après lecture de quelques posts sur des forums de barbus, l’ajout d’argile ne semble pas être tellement apprécié. Au mieux on ne sent pas la différence à l’usage, au pire ça use la lame plus vite.
Laissez aussi de côté les ajouts de poudres dont on sentirait les grains afin de ne pas irriter la peau.

Comme le savon de rasage est amené à rester quelques minutes sur la peau et que ça peut, malgré tout, être « agressif » pour les peaux sensibles, il ne faut pas hésiter à monter le surgras dans les 10/12% voir même plus si vraiment les peaux sont sensibles. Il faudra cependant garder à l’esprit que plus le surgraissage sera haut, moins le savon moussera.

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Améliorer la solubilité

L’inconvénient avec les recettes très riches en acide stéarique (en plus du fait que ça trace très, très vite) est que ça donne des savons peu solubles. Il faut les frictionner un moment avant que ça commence à mousser. On va donc chercher à améliorer la solubilité. Pour ça, plusieurs possibilités :

  • intégrer de l’huile de ricin à la recette. Sa solubilité est à 64 sur Mendrulandia alors que celle de l’acide stéarique est à 36… C’est une huile qui a donc 3 avantages dans ce type de recette : elle booste la mousse, apporte du glissant et permet d’avoir un savon plus soluble qui s’émulsionnera donc mieux.
  • intégrer de la glycérine. En comparant plusieurs recettes, je l’ai trouvée dosée entre 3 et 15%.
  • utiliser une lessive mixte soude/potasse. La potasse est utilisée principalement pour faire des savons liquide, elle donne donc des savons qui se diluent facilement. L’utiliser dans un savon à barbe permettra de faciliter la montée de la mousse puisque le savon s’émulsionnera mieux. Vous trouverez un article détaillé sur la solution mixte soude/potasse ici avec un détail des proportions suivant le type de savon et son calcul. L’utilisation de potasse permettra également de mieux maîtriser la trace.

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Utilisation

Si vous utilisez une lessive mixte soude/potasse, le savon ne durcira pas complètement et restera un peu tendre. Il sera donc préférable de couler les savons dans des bols. Privilégiez un bol assez large afin d’avoir suffisamment de place pour émulsionner le savon avec le blaireau. J’ai coulé les miens dans des petits ramequins trouvés chez Centrakor. Je vous ici.

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En attendant de vous retrouver, prenez soin de vous !

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Mes sources

Modern SoapMaking – How to make the best wet shaving soap
Modern SoapMaking – Tutorial : shaving sap with stearic acid
The Nerdy Farmwife – How to create your own shave soap recipe
Lovin Soap – Shave soap recipe, how to make a dual lye tallow shave soap
The things well make – DIY shaving soap recipe
Kapia Mera – Making dual lye shaving soap
Ultimate HP soap – What the suds !? Cetyl Alcohol in soap

6 réflexions au sujet de “Formuler un savon de rasage”

  1. Sa mousse doit être abondante, dense et crémeuse afin d’être répartie uniformément sur la zone à raser. On ne veut donc pas de mousse aérienne à grosses bulles ou de mousse fine et laiteuse. »

    C’est quand même bien couillon de parler de « dense et crémeux » et de nous montrer en photo un truc léger et aérien. C’est certe plus dense que la mousse d’un savon à mains, mais on est encore loin du compte.

    Elle doit aussi être durable et tenir sur la peau le temps du rasage sans s’estomper.

    là ça m’inquiète un peu. J’ai fait mon premier savon à 100% karité. La mousse est encore plus dense que la grosse merde qu’on voit sur la photo, et pourtant ce que j’obtiens est encore trop aérien et pas durable. Je monte la mousse, j’étale bien sur la joue droite, la gorge, la joue gauche, et j’ai à peine le temps de poser mon blaireau que y’a déjà la moitié de la mousse qui s’est volatilisée à droite.

    C’est une bonne idée que ces 2 acides gras représentent entre 30 et 40% de votre recette

    ça me parait clairement bien faiblard. mon premier savon c’est avec un lot de Karité de Guinée qu’Aroma-Zone annonce à plus de 50% d’acide stéarique. et la mousse ne tient pas. c’est encore trop pauvre en stéarique. Ou trop riche en oléique ? J’avais vu une vidéo youtube d’une savonneuse américaine qui disait que l’oléique, linoléique et linolénique sont des tue la mousse. Je me demande si c’est pas bel et bien ça le problème.

    Quand je regarde les compositions des vrais pros du savon à raser, je crosi que la douceur est à chercher dans le surgraissage, pas dans le savon lui-même.

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  2. Bravo, je n’ai pas encore trouvé de meilleurs. explications que celles-ci.
    Difficile de se passer l’huile de palme pour le savon à barbe visiblement.
    Merci encore pour cet article.

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