Chaudron gel et huile de lin

L’huile de lin, pour être honnête, je n’en voyais pas l’utilité en savonnerie.
On la voit souvent dans les savons ménagers mais son pouvoir lavant est nul, ce qui me laisse perplexe… Et pour un savon corporel, son iode à 177 était rédhibitoire !

Et puis on m’en a offert une bouteille.

Je m’étais dit au départ que je m’en servirai en cuisine. Une petite cure d’oméga 3 ne peut pas faire de mal. Mais comment dire… L’odeur déjà, c’est pas terrible mais le goût est encore pire. Oups !

Alors je me suis décidée à la tester dans un savon au chaudron afin de la préserver au maximum.

La recette

Je suis partie sur un mélange d’huile stable afin de limiter les risques de rancissement. N’ayant plus d’olive en stock (c’est possible ça ?!), je me suis rabattue sur l’huile d’arachides qui ne m’a, personnellement, jamais causé de soucis. Si vous voulez tenter la recette, je vous conseille quand même de partir sur de l’olive ou du tournesol oléique, ce sera plus stable dans le temps.

Par ordre d’importance, nous avons :

Arachides (37%), son de riz, mangue, coco (15%), ricin, cire d’abeille
67% d’huiles fluides, 30% de gras durs, 3% de cire d’ abeille
un surgras total de 8% dont 1% par réduction de soude

Pour mes chaudrons, je formule mes recettes seulement avec les huiles qui cuisent et avec un surgras d’1%. Je ne tiens pas du tout compte de mon huile de surgraissage, c’est pour ça que l’huile de lin ne figure pas dans la liste.

Voici ce qu’indique Mendrulandia avec la réduction de soude d’1% :

Douceur	Bulles	Dureté	Lavant	Tenue	Séchage	Solubilité
48	52	54	53	56	51	50

On gardera à l’esprit que ce sont les propriétés du savon surgras à 1%. Une fois le surgraissage additionnel ajouté cela améliorera la douceur et le pouvoir lavant diminuera. Je ne le fais pas d’habitude, mais c’est juste pour vous montrer, si j’ajoute mon huile de lin et que je mets le surgras à 8 ça donne ça :

Douceur	Bulles	Dureté	Lavant	Tenue	Séchage	Solubilité
54	49	52	47	48	48	51

Pour les ajouts, j’ai fait simple :
Avant cuisson :

• 3% de lactate de sodium
• 3% de farine de riz

Après cuisson :

• 3% de miel de thym
• 3% de yaourt
• 7.5% de gel de lin très épais
• 2.5% de fragrance Mimosa de LFDS
• huile de lin(+ 0.2% de son poids en vitamine e) pour porter le surgras à 8%

Pour calculer la quantité d’huile de surgraissage à ajouter après cuisson, vous pouvez vous référer à mon article qui vous propose 2 méthodes de calcul. C’est ici.

Préparation du gel de lin et dissolution de soude

C’était la première fois que je faisais du gel de lin et j’avais plein de questions en tête… Est-ce que ce sera assez fluide pour y diluer la soude ? Est-ce que la montée en température ne va pas augmenter la gélification ? Est-ce que je pourrais filtrer avant l’ajout aux huiles pour m’assurer qu’il n’y ait plus de perles de soude ?

Ça a vraiment été de l’expérimentation !

Pour préparer le gel de lin j’ai suivis les dosages trouvés sur les groupes de cosméto.
Il faut : de l’eau, des graines de lin (10% du poids de l’eau) et une casserole. Pour la quantité d’eau, j’ai prévu le double de la quantité de liquide nécessaire pour le savon.

J’ai mis graines et eau dans la casserole à feu très doux. Dès que l’eau a commencé à frémir, j’ai éteint le feu et j’ai filtré le poids de gel dont j’avais besoin pour diluer la soude et je l’ai laissé refroidir à couvert pour éviter l’évaporation.

Une fois à température ambiante, j’ai ajouté le lactate de sodium puis j’ai ajouté la soude en plusieurs fois en mélangeant bien entre chaque ajout. Il faut obligatoirement mélanger sinon les perles restent en suspension dans le gel. J’ai pris mon temps et ça s’est bien fait. Le gel s’est opacifié au fur et à mesure de l’ajout de la soude, c’était moins pratique pour s’assurer que les perles se soient bien dissoutes, mais il n’a pas épaissit (c’est surtout ça que je craignais…). Et j’ai pu le filtrer à l’aide d’une boule à thé avant de l’ajouter aux huiles.

Préparation du savon

En préparant mon matériel je me suis dit que ça pourrait être sympa si je colorais mon savon dans les tons bleu/parme pour rappeler la couleur des fleurs de lin. J’ai pensé à l’orcanette mais fourbe comme elle est, je n’étais pas trop motivée, surtout que l’huile de lin est ultra jaune…

Monsieur Savonne m’a encouragé à tenter. Quitte à être dans l’expérimentation avec le gel de lin, autant expérimenter jusqu’au bout ! Alors j’ai fini par sortir mon flacon de macérat. Ça tombait bien puisqu’il était sur base arachides, je n’ai donc pas eu besoin de modifier la recette. Il me suffisait simplement de remplacer une partie de mon huile d’arachides par le macérat.

J’avais déjà fait il y a quelques temps des essais avec l’orcanette, vous pouvez les retrouver ici et là. Pour le premier, la couleur donnait un gris tirant sur le lavande avec le macérat dosé à 3% et un vrai violet avec un dosage de 5%.

Pour celui-ci, j’ai coupé la poire en deux et je suis partie sur 4%. Et comme l’huile de surgras était déjà choisie, j’ai dû mettre le macérat en cuisson.
La couleur est tellement belle !

Et comment dire… Mon savon est passé par toutes les couleurs ! Il a commencé par un prometteur gris bleuté. Puis ça a tiré doucement sur le vert et à l’ajout du surgras c’était franchement vert. Étonnant, non ? ^^

Bon, même si la couleur de ce savon risque de laisser à désirer, il compense par sa mousse ! Regardez ma mijoteuse pendant la session vaisselle, c’est fou !

Le résultat

D’habitude je fais des photos du pain de savon avant de le trancher. Cette fois-ci j’étais tellement dépitée par la couleur que je ne l’ai pas fait… Voici ce que ça donne une fois coupé :

À gauche, un morceau tout frais coupé. On est à mi chemin entre le jaunâtre, le beige et le grisâtre… Et à droite c’est un morceau qui a eu quelques heures de séchage. Le jaunâtre n’est (quasi) plus là mais la couleur est toujours indéfinissable et pas très engageante… On dirait qu’ils ont le mal de mer ^^’

Heureusement, au bout de quelques jours, la couleur a fini par évoluer et s’est fixée sur un beige acceptable. Point de mauve, mais vu les couleurs de départ, je ne vais pas me plaindre, on revient de loin quand même ! Il a pas mal de nougat mais ça lui donne un certain charme. Finalement il me plaît bien !

J’ai mis les chutes dans un sachet en organza et je me suis empressée de les tester sous la douche. Je crois que le gel de lin va devenir mon nouveau liquide de dissolution favori ! C’est tout doux, ça donne un beau glissant et une belle onctuosité à la mousse. C’est très cocooning. J’ai hâte de voir ce que ça va donner dans quelques mois !

Je viendrai vous faire un retour dans quelques mois pour vous dire comment il a évolué et si il tient le coup avec l’huile de lin.

En attendant de vous retrouver, prenez soin de vous !