Les cires, Savons saponifiés à chaud

Un chaudron à la Paoway

J’apprécie les savons au chaudron, leur aspect brut, leur douceur, leur belle mousse. C’est d’ailleurs avec cette méthode que j’ai réalisé mon savon le plus doux, le seul que mon visage tolère. Si son histoire vous intéresse, elle est ici.
Mais je ne prends pas autant de plaisir à savonner qu’en faisant un SAF. J’apprécie peu de devoir attendre devant la mijoteuse, d’être passive. Et la mise en moule parfois digne d’un maçon du dimanche a de quoi exaspérer mon côté perfectionniste.

Il y a peu, sur un groupe facebook dédié aux savons faits au chaudron, je suis tombée sur une technique qui a piqué ma curiosité : le chaudron façon Paoway.

separateur_texte

Le chaudron façon Paoway

Comme son nom le laisse deviner, cette méthode vient de Paola, qui est une savonnière quasi voisine, et permet de faire un savon saponifié à chaud sans apporter de chaleur durant la saponification.
Oui, oui, vous avez bien lu ! On ne cuit pas la pâte à savon.
On démarre avec les huiles et la solution de soude très chaudes. On mélange jusqu’à la trace, on retire le récipient de la source de chaleur (bain-marie ou mijoteuse) puis on laisse la saponification se faire seule en surveillant.
Avec cette méthode il semblerait que la pâte reste fluide pendant tout le processus.

Entre la rapidité du processus, la fluidité de la pâte et le fait qu’on ne cuise pas, je ne sais pas ce qui m’a le plus tapé dans l’œil… Il fallait que je teste ! J’avais la recette parfaite pour ça. Une recette mêlant huile d’avocat, beurre de mangue, ricin et cire d’abeille. Une recette promettant d’être douce mais ingérable en SAF.

Paola a publié 2 vidéos sur sa méthode, je vous en laisse une ici :

Je l’ai à nouveau visionnée avant de fignoler ma recette. Voici ce que j’ai pris en note :

  • la quantité de liquide est calculée en fonction du poids des huiles.
    Elle utilise un total de 38% de liquide : 30% du poids des huiles pour diluer la soude et les 8% restants en ajout après cuisson. Par exemple, pour un savon d’1kg d’huile, on dilue la soude dans 300g d’eau et on ajoute, après cuisson, 80g du liquide de notre choix (lait, bière, jus etc.). On ne travaille donc pas avec la concentration de soude. 
  • la solution de soude est aux alentours de 90°C (194°F) lorsqu’elle est ajoutée aux huiles. Le mélange d’huiles quant à lui est à 94°C (201°F).
  • On mélange jusqu’à une texture « pâte à gaufre », on enlève le récipient de sa source de chaleur et on laisse faire en surveillant bien car ça va vite.
  • Lorsque la saponification est terminée et que le pH est bon, on peut faire les ajouts en commençant par le yaourt qui va aider à fluidifier la pâte. Elle en ajoute 2 cuillères à soupe par tranche de 500g d’huiles. Une cuillère à soupe fait environ 20g donc on est à environ 4% du poids des huiles en yaourt, il n’est pas compté dans les 8% de liquide additionnel.
  • Il ne reste plus qu’à mouler.

 Et quelques précisions qu’elle a apporté sur le groupe de chaudrons :

  • Si la température descend trop et que la phase de mouton ou de gel ne vient pas, on peut remettre la pâte à chauffer au bain-marie ou dans la mijoteuse.
  • Les ajouts sont tiédis/chauffés afin d’éviter de faire baisser la température de la pâte lors des ajouts.
separateur_texte

La recette

Par ordre d’importance nous avons :

Avocat (30%), mangue, son de riz, coco (15%), cacao, ricin, cire d’abeille
55% d’huiles fluides, 40% de gras durs et 5% de cire d’abeille
Réduction de soude d’1%
huile de chanvre après cuisson pour un surgras total de 8%

C’est une recette riche en acides palmitiques (avocat, cacao et son de riz) et en acide stéarique (mangue et cacao). Elle promet d’être crémeuse.

Une fois saponifiée avec une réduction de soude d’1% voici ce qu’indique Mendrulandia niveau propriétés (l’ajout d’huile en fin de cuisson augmentera la douceur) :

DouceurBullesDuretéLavantTenueSéchageSolubilité
47535554475249

Et Soap Home Made :

DuretéDétergenceDouceurMousseStabilité
4019561937

La quantité de liquide est répartie comme suit :

  • pour diluer la soude : 30% du poids des huiles en eau de cuisson de riz
  • en ajout après cuisson : 8% du poids des huiles en lait d’avoine fait à partir de flocons d’avoine et d’eau de cuisson de riz.

Concernant les autres ajouts, nous avons,
Avant cuisson :

Après cuisson :

  • lait d’avoine
  • 3% de miel
  • 4% de yaourt
  • de l’huile de chanvre pour porter le surgras à 8%. La quantité d’huile a été calculée grâce à mon calculateur que vous trouverez ici. Et si vous souhaitez plus d’explications sur le surgraissage en méthode à chaud, je vous laisse visiter l’article explicatif qui est .
  • 2% de fragrance Perce Neige de Terre de Bougie

Concernant les ajouts liquide et le yaourt, j’ai totalement suivi les dosages de Paola, j’ai simplement ajouté du miel en plus.

separateur_texte

La préparation

J’ai commencé par peser huiles/beurres/cire et je les ai mis à chauffer dans la mijoteuse.
J’ai ensuite dilué le citrate et le lactate dans l’eau de riz. Puis j’ai attendu que le mélange d’huile arrive à température avant de préparer la solution de soude. Je n’ai pas de thermomètre donc je travaille à l’œil. Pour rappel, les huiles doivent être aux alentours de 94°C( 201°F) et la soude vers 90°C (194°F).
J’ai ajouté la farine aux huiles et j’ai mélangé pour bien la disperser et j’ai ensuite ajouté la solution de soude. Vu la recette, je peux vous garantir que je n’ai pas attendu la trace. Trois tours de fouet et elle était là ! J’ai débranché la mijoteuse et j’ai sorti la cuve.
En attendant les premiers moutons, j’ai préparé mes ajouts.

C’est allé très vite. Au bout de 10 minutes la pâte a commencé à gonfler. Je n’ai pas résisté, j’ai touillé. Deux minutes plus tard la phase de gel a montré le bout de son nez et 30 minutes après avoir sorti la cuve, la saponification était terminée et le pH ok.

En fin de cuisson la pâte était beaucoup moins sèche que d’ordinaire mais pas très fluide. Je pense que ça vient de la cire d’abeille et du fait que j’ai pas mal ouvert pour touiller. Du coup, j’ai eu un peu de nougat.

DSC_0006

Après l’ajout de yaourt, niveau fluidité c’était déjà mieux.

Et après les ajouts, encore mieux ! J’ai pu mouler dans problème.

separateur_texte

La découpe

decoupe

Je ne pensais pas avoir autant de nougat mais j’adore le résultat ! Cette fois-ci je n’ai pas eu envie de les tamponner du même motif qu’ordinaire alors je me suis armée d’un pic en bois et j’ai gravé les branches.
L’odeur de l’huile d’avocat est moins perceptible qu’en SAF et a un rendu plutôt jaune alors qu’en saf elle garde un joli vert, je suis un peu déçue… La fragrance quant à elle, comment dire… Monsieur Savonne la trouve mais pour mon nez, elle est quasiment imperceptible. On verra si elle se révèle à l’usage. Il fait déjà une belle mousse.

mousse

separateur_texte

Mon avis sur la méthode Paoway

Les points positifs :

  • ça ne m’a pas pris plus de temps qu’un chaudron classique.
  • j’ai apprécié de ne pas avoir à cuire la pâte. Les huiles ne sont pas soumises à des températures excessives et la saponification suit son cours à son rythme. La température de la pâte descend tranquillement et en fin de processus j’ai pu tenir la cuve à pleines mains sans me brûler (ce qui change de d’habitude…) et c’est donc plus facile pour mouler.
  • comme on ne cuit pas la pâte elle reste plus souple et se désèche moins. Elle est plus agréable à travailler et à mettre en moule.

Le point négatif :

  • j’ai suivi à la lettre la méthode d’ajout liquide de Paola ainsi que les quantités et mon savon a bien mis 10 jours avant de cesser d’être tendre au toucher. Je n’ai pas cette habitude… D’ordinaire je fais peu d’ajouts liquides et je compte dedans le miel et le yaourt donc forcement mes savons durcissent plus vite.

Pour conclure, c’est une méthode que j’ai bien appréciée et que je referai avec plaisir (il faudra que j’investisse dans un thermomètre ^^). Mais j’adapterai la quantité d’ajouts liquide afin d’avoir un savon qui durcit et sèche mieux.

Prenez soin de vous !

18 réflexions au sujet de “Un chaudron à la Paoway”

  1. Coucou technique très intéressante il me semble que Ka fée démarrait un savon avec la soude encore chaude ensuite le procédé diffère puisque ici il est cuit son site n’est plus accessible est c’est bien dommage elle avait fait tout une séries de test sur le savon très intéressante

    J’aime

    1. Bonjour, je crois que tu parles de la méthode de transfert de chaleur plutôt, là. Ça permet de fondre les beurres. Je fais tous mes savons de cette façon, je trouve que ça fait des savons plus doux, je ne sais pas par quel mystère. Ça évite aussi de devoir mixer (trop) longtemps, même si on met moins de beurres dans sa formule (je suis toujours en dessous de 50% de gras durs). Par contre le risque est de ne pas bien diluer la soude en allant trop vite pour la verser sur les beurres – ouai, ça m’est arrivé 😀
      Et, en hiver, veiller aussi à ce que l’eau est les huiles/beurres ne soit pas trop froids, sous peine que les gras durs ne fondent pas assez.

      J’aime

  2. Ha voila une technique fort intéressante ! C’est chouette de voir qu’il y a encore plein de choses à expérimenter et découvrir. Bien joué ! 🙂

    Aimé par 1 personne

  3. Bonjour, j’aimerais bien essayer cette méthode mais est ce que c’est possible avec de la lessive de soude du coup ? Merci
    Et merci pour tes post vraiment super.

    Aimé par 1 personne

    1. Bonjour,
      La lessive de soude toute prête ne se fait pas chauffer et s’utilise à température aambiante. Donc avec elle, ce n’est pas possible d’utiliser cette méthode puisqu’on a besoin que les huiles et la soude soient toutes très chaudes.

      J’aime

  4. Merci de cette description qui me permet de mieux comprendre la méthode. Je pense que je ferais mon 1er chaudron avec cette méthode, car je n’ai pas de mijoteuse.
    Juste une précision : si je comprends bien, la quantité de soude est calculée comme habituellement par le calculateur; mais pour l’eau, c’est en fonction de PDH, donc on ne tient pas compte de ce qu’indique le calculateur ?

    Aimé par 1 personne

    1. Avec plaisir 😊
      Oui, la quantité de soude est calculée comme habituellement pour un savon au chaudron. Tu as mon article à ce sujet ici : https://mademoisellesavonne.wordpress.com/2020/06/29/surgraissage-en-saponification-a-chaud/
      Et pour la quantité d’eau, Paola utilise SoapCalc où on peut choisir de mettre l’eau en fonction du PDH. Mais avec Mendrulandia il faudra la calculer à part et ne pas tenir compte de la quantité indiquée.
      Personnellement la prochaine fois je calculerai mon eau comme d’habitude avec la concentration et pas en fonction du PDH.

      J’aime

Laisser un commentaire